· lluís carulla ruiz ·
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en moviment

lluís carulla ruiz

16.09 – 16.10.2016

I.- L’histoire de l’art est une flèche qui met en mouvement différentes scènes de la représentation visuelle; cependant, l’art plastique se manifeste à nous depuis sa fixation, en nous montrant son traffique à travers le calme. Le vol suspendu et l’univers comme une toile au plafond, comme un parchemin dans l’obscurité. Un temps arrêté qui est donc immobile et en mouvement. Dans le travail artistique que Lluis Carulla Ruiz présente à la Galerie Cadaqués, qui fut la porte d’entrée des plus hautes manifestations internationales de l’art concret, ainsi que pour les membres qui font partie de cette tendance, l’art se déplace même quand il est hors de son contexte. L’art, pas l’histoire ou l’événement, est pour eux un mouvement. L’art concret, s’écartant des séparations classiques entre idée et expérience, original et mimèse, forme et fonction, poésie et science, fit un grand effort pour unir rationalité et beauté. Il a également su mettre sur un même plan les données froides et abstraites des noms et leurs combinaisons limitées et harmonieuses avec la recherche sur l’illimité, inhérent à toute recherche. Le développement de cet art d’analyse était à la fois impraticable et spéculatif et efficace : ce fut le cas dans les solutions esthétiques formelles de l’architecture et des objets industriels qui ont peuplé les villes et les maisons dans la longue révolution positive et humaniste qui a occupé une grande partie de la vie moderne du XXe siècle. Que dans les allées et venues du nihilisme critique face à l’académisme où se termine toute révolte et qu’au milieu de la subordination de l’art à la règle de l’histoire, un artiste poursuive des profits aussi élevés, ne cesse d’émerveiller ceux qui souscrivent cela dans l’esprit d’inviter aussi les spectateurs du présent. Cependant, ouverts comme nous sommes, je voudrais mettre face à face, pour un moment, afin de forcer comparaison et choix, les dérives des objets gratuits du néodadá, un siècle après, et les formalisations pures du Neoplasticisme abstrait et concret. Et je mettrai comme exemples terminaux le délire de la non-raison dans l’un et dans l’autre cas le purisme de la non-irrationalité. D’abord dans l’architecture ludique, métaphorique, ironique, technologique et hautaine des métropoles, puis, en opposition, l’architecture formelle, linéaire, rigoureuse, environnementale et intégrée dans les petites populations rurales ou côtières aux traditions culturelles enracinées. On peut en effet objecter que le propre de l’architecture ne l’est pas de l’art.

 

II. – L’art que pratique Lluis Carulla Ruiz me rappelle les grands moments de l’histoire des formes : le plan en opposition à la perspective, les superpositions dans un plan bidimensionnel d’autrefois, la mise en mouvement mentale de l’artiste et l’expérience dans les mains du visiteur. Aussi, le mouvement et le jeu de couleurs qui modifie et différencie toute surface donnée. Ses objets font partie du mouvement parce que le mouvement est à l’intérieur du statique. Il ne s’agit pas d’une représentation visuelle de formes et de formes avec des mots, mais ce qui est interne à l’existence nous parvient. Après tout, la vie est un mouvement et des rythmes qui cherchent un équilibre entre les nombreux autres systèmes. Sans faire de distinction entre le langage textuel et le langage visuel, nous devrions nous mettre d’accord sur les règles autonomes et sur les règles communes et universelles. La forme des objets sculpturaux présentés ici pourrait être divisée en deux groupes : les sinueux et rectilignes. Dans les uns je vois l’abstraction des lois physiques et poétiques; dans les autres, l’organisation des mathématiques. En d’autres termes, la lyrique et l’épique. Qui sait si c’est pour cela que les premiers ont un mouvement proche de la nature, à la sinuosité de la croissance dans la lumière et dans l’usure des éléments naturels en lutte. Alors que dans les lignes droites, le mouvement de l’histoire est imposée par des superpositions de plans. Dans l’un, la force créatrice; et dans l’autre, la réflexion.

L’art de Lluís Carulla Ruiz naît d’une tension interne où ce qui est mesurable et commandable peut aussi être une figure de la danse, et vice versa. Son langage à la fois réfléchit à ce qui est devant nous et provoque un mouvement pour placer le spectateur dans un autre espace de représentation inédit. Il faudrait pouvoir voir un drame du sens psychologique et un drame du sens des formes. Le sujet humain est très présent. C’est peut-être pour cela que la théorie des couleurs est exprimée avec une telle pureté.

 

III. – En conclusion, dans un sens littéral, l’œuvre de Luis Carulla Ruiz prend parti aux côtés des grandes contributions de l’art concret et de son degré zéro. Nous nous trouvons dans un renouveau d’un style néo-avant-garde séparé des exagérations expressionnistes et de la dérive déconstructive. Il s’inscrit dans l’histoire et reprend les expériences et la sensibilité d’une recherche impure, artistique. À partir de cet objectif, se déploie un sens allégorique, une idée positive de l’art comme forme et comme expérience de sensibilité et de connaissance. L’artiste acquiert une noble vicissitude morale : il faut faire de l’art et, au sens anagogique, non seulement produire des objets, mais aspirer à ce que ces œuvres transforment l’expérience de la réalité et fondent une réalité. L’art est la substance, pas un outil. L’art nous affecte, nous déplace. Vivre à côté d’une œuvre d’art, dans ce cas de Lluis Carulla Ruiz, vivre avec elle, nous rend différents de ce que nous étions. L’art n’habite pas dans un salon, mais dans la pièce de l’être. Le lecteur aura senti que nous nous sommes opposés à une conception strictement instrumentale. Les sculptures en mouvement de Lluis Carulla Ruiz remuent les eaux stagnantes. À un moment, l’espace statique se ranime. Comme les mots ou les syntagmes, les cellules visuelles s’activent comme la pensée contemplative. Un dynamisme immobile. Ici, une immobilité dynamique, porteuse de mémoire. Certaines sont comme des frises de danseurs, d’autres sont des touches gestuelles, et d’autres, comme des rotations mécaniques célibataires à la manière des Man Ray et Duchamp. Je dirais que c’est du matériel visuel qui prend place dans l’esprit et qui met en énergie l’art dans l’espace… parce que nous sommes langage dans un monde physique et psychique, cosmique et social. Sans séparation. Art et technique, poésie et science.

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